Propos recueillis par Luc LANGERON.
LL : Vous avez pris vos fonctions en septembre dernier, rappelez-nous quelles sont vos missions sur ce nouveau poste ?
William WEISS. Le CNFPT a vocation à accompagner les collectivités sur deux champs. La formation des agents à proprement parler et le deuxième, l’accompagnement des collectivités et des établissements publics dans le cadre de leur évolution au sein de la société. Le CNFPT est là pour accompagner ces évolutions. Ma mission consiste à apporter les connaissances métier sapeur-pompier pour mes collègues du CNFPT.
LL : Pour les sapeurs-pompiers, l’offre de formation est pilotée par votre direction ?
WW : Sur le sujet sapeurs-pompiers, il a y une direction métier dénommée « direction de la formation des sapeurs-pompiers » avec 3 champs d’action. Participer au pilotage, de la création et de la mise en œuvre des actions de formation des Sapeurs-pompiers et de réalisation de dispositif d’accompagnement des SDIS afin de développer et faire évoluer ces établissements publics au travers du déploiement de différentes politiques publiques.
LL : Le CNFPT, votre direction et Valabre entretiennent des relations constructives et qui peuvent encore se développer ?
WW : Aujourd’hui, à la lecture du dernier arrêté sur la formation 2019, édité par la Ministère de l’Intérieur et par la DGSCGC, le panorama des différents acteurs de la formation est très clair. Les SDIS bien sûr, l’ENSOSP, l’Entente -ECASC et le CNFPT ont chacun des champs d’action précis, complémentaires et sans aucune intention de compétitivité. Le CNFPT a un rôle à jouer dans la formation des pompiers professionnels en France et il est naturel de pouvoir travailler avec les autres partenaires comme l’ECASC, pour ensemble monter des projets en se basant sur les compétences de chacun.
LL : Et sur les spécialités, votre approche est similaire ?
WW : Le CNFPT ne peut aujourd’hui s’investir qu’au travers de la règlementation que sur quelques spécialités, notamment tout ce qui est formation au développement des compétences et de la pédagogie, ce qui est en lien avec l’encadrement des activités physiques ou en lien avec les systèmes d’information et de la communication. Ces domaines de compétences qui nous sont attribués nous permettent d’aller chercher des personnes ressources qui ne sont pas spécifiques et issues du milieu « pompier ». Il n’y a pas de sens pour le CNFPT de s’investir ou de participer aux actions de l’ECASC, aux spécialités opérationnelles au cœur de son activité comme la montagne, la conduite tout terrain, le risque feu de forêt… L’ECASC dans son champ d’action dispose des personnes ressources, des installations et de la technicité sur ces sujets dans lesquels le CNFPT n’a aucune expertise.
LL : Et pourtant, vous avez des attentes pour un travail en commun avec l’Entente…
WW : Tout à fait. Deux champs d’action pour du partage et de la coopération. Dans un premier temps, c’est sur le sujet de la conduite. L’ECASC a une vraie culture et une vraie histoire, notamment autour de la conduite en milieu tout terrain, avec une vraie expérience. Le CNFPT n’a pas vocation à s’investir dans cette spécificité mais le CNFPT a lui une expérience forte dans le domaine de la prévention du risque routier. C’est probablement un des plans d’action très fort au niveau des SDIS particulièrement avec la récente réglementation sur la conduite d’engins des SIS et avec le proche référentiel devant être édité par la DGSCGC. Le CNFPT a déjà longuement travaillé sur la problématique de l’accidentologie et se positionne pour accompagner les SIS dans le domaine des plans de prévention des risques routiers, ce qui vient en complémentarité et non concurrence avec l’ECASC qui forme avec efficacité dans la « pure conduite ». Le CNFPT va plus travailler sur le schéma global et la politique « prévention ru risque routier et l’ECASC comme acteur de terrain envers les conducteurs, notamment hors-chemin.
Notre deuxième champ commun devrait porter sur l’offre numérique d’apprentissage. A travers ENASIS il y a une dynamique extrêmement intéressante. Je pense que nous devrons réfléchir en commun et avec les autres acteurs dynamiques sur les environnements numériques d’apprentissage, sur l’apport du digital dans les formations et sur le modèle de demain, son approche technique et économique. Le CNFPT a hybridé via le digital de très nombreuses formations, nous devons accumuler nos compétences, mutualiser nos expériences au service de la formation des sapeurs-pompiers.
LL : L’hybridation serait votre maître mot ?
WW : Si vous vous référencez aux évolutions et aux analyses actuelles des sciences sociales, nous avons tous une façon d’apprendre différente. Les maîtres mots actuels sont « individualisation, hybridation » dans un objectif d’efficience de la formation pour l’efficacité en activité de sapeur-pompier. Tous les modèles et techniques doivent permettre de dynamiser le modèle de développement des compétences (classes inversées, formations à distance, formation en situation de travail, synchrone ou asynchrone, MOOC, SPOC, capsule, tuto, …). Nous devons aussi nous interroger sur la différence entre apprendre (pour commencer à pouvoir faire) et s’entrainer (training) pour maintenir et développer l’efficacité.
Nous ne pouvons plus raisonner dans nos modèles sans utiliser le digital avec en sus demain l’intelligence artificielle, la robotisation et les simulations virtuelles.
Le CNFPT a largement hybridé ses formations depuis plusieurs années, avec un taux d’hybridation très élevé entre le présentiel et le distanciel. Il reste du chemin à parcourir, mais c’est un avenir incontournable !
LL : Pour conclure, une ambition ?
WW : Je crois qu’aujourd’hui l’ambition première, est que chacun trouve sa place avec une notion de complémentarité. Nous avons besoin des forces vives de tous les territoires et de tous les environnements. En revanche, il nous faut réfléchir sur l’efficience de nos activités, ne pas faire car nous savons le faire, mais faire car c’est un besoin pour notre modèle de sécurité civile. Il ne faut pas avoir peur de mot tels que rationalité.
Nous avons la responsabilité de nous interroger sur le sens, la pertinence et l’efficience de nos dispositifs, tant pour individuellement, chacune des entités œuvrant pour le développement des compétences que collectivement sur notre complémentarité.
Tout seul, on va plus vite, mais ensemble, on va plus loin et on est plus fort …